OLF, i.e. Olf Le Fol Site Admin

Joined: 01 Aug 2007 Posts: 451 Location: FRANCE
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Posted: Mon Sep 08, 2008 8:18 am Post subject: La gastronomie, l�art, la culture et la civilisation |
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� L�alimentation est un besoin naturel que les hommes ont su transformer en plaisir. La gastronomie est donc un fait de civilisation. Y renoncer n�est pas seulement accablant, c�est �galement accepter de perdre une partie de notre humanit� �.
Lorsque nous �crivions les lignes pr�c�dentes, dont nous pouvons vous r�v�ler qu�elles ont beaucoup voyag�, nous f�mes l�objet de quelques railleries. Or, aujourd�hui, un D�ner presque Parfait est le plus important succ�s de l�ann�e en mati�re d�audiences t�l�, ce qui confirme l�int�r�t consid�rable que portent les fran�ais � la question gastronomique. Et, surtout, notre pays a tr�s officiellement demand� que sa gastronomie soit inscrite au patrimoine mondial immat�riel de l�Unesco.
Nous avions donc vu juste.
Evidemment, nous avons soutenu totalement une telle initiative. Pourquoi ? Parce que la gastronomie, qui est la connaissance de tout ce qui se rapporte � la cuisine, � l�ordonnancement des repas, � la d�gustation et � l�appr�ciation des mets, est un fait culturel essentiel, le plus f�d�rateur de l�histoire de l�humanit�.
Gastronomie et culture
La culture est l�ensemble des usages, des coutumes, des manifestations artistiques, religieuses et intellectuelles qui d�finissent un groupe, une soci�t�. Or, quoi mieux que la gastronomie raconte l�histoire de l�humanit� : de la ma�trise du feu, � l�invention de la roue, en passant par celle de l��tiquette, de l��lectricit� et des micro-ondes ? L�homme est le seul �tre vivant ayant r�pertori�, invent�, plus de 424 fa�ons (dont 328 rien qu�en France) pour accommoder les �ufs avant de les manger. Chaque groupe ethnique, m�me le plus petit, m�me le moins civilis�, est reconnaissable gr�ce � ses id�aux et ses tabous gastronomiques, chacun invente des recettes propres, qui sont le miroir de sa soci�t�, de sa religion, de ses besoins et de son terroir. L�expression : � dis-moi ce que tu manges, je te dirais qui tu es �, est donc vraie. Il n�existe pas de tribus o� le cuisinier, qu�il soit chef, femme au foyer ou sorcier, ne poss�de une place privil�gi�e, respect�e au sein des groupes familiaux, �conomiques et politiques.
La gastronomie est donc bien une composante culturelle, et m�me sociale, primordiale.
Gastronomie et civilisation
L�alimentation est le second besoin naturel inali�nable, le premier �tant le sommeil. L��tre humain peut �tre priv� de tout : de litt�rature, de cin�ma, de po�sie, d��lectricit� il parviendra � survivre. Il n�y a que si on le spolie de nourriture ou de sommeil qu�il est in�luctablement vou� � la mort. Or, parmi ces deux besoins vitaux, il y en a un que l��tre humain civilis� est parvenu � transformer en plaisir gr�ce � la gastronomie : l�alimentation. Il est d�ailleurs la seule cr�ature � avoir r�ussi cet exploit. Chacun mange une, deux, voire m�me trois fois par jour pour les plus chanceux, selon des rituels souvent tr�s pr�cis. Et, se faisant, en mettant des champignons et de la ciboulette dans son omelette, en accordant la Roman�e Conti avec du gibier, ou en r�chauffant simplement un couscous d�une marque c�l�bre, chacun puise � l�int�rieur d�un patrimoine culturel et artistique d�une profondeur vertigineuse, qui le relie � ses anc�tres, � son territoire, � son groupe social et, surtout, � lui-m�me.
La gastronomie est donc bien un fait de civilisation capital.
Mais la cuisine est-elle une forme d�art ? Nous allons faire la d�monstration que la r�ponse est positive.
La cuisine et l�art
L'art est une cr�ation artificielle, qui exprime la sensibilit� d�un homme (l�artiste), et dont le r�sultat communique au public un sens des valeurs qui peut changer sa vie, ou au moins influencer durablement sa perception du sujet repr�sent�. Un pigeon gisant sur la chauss�e, c�est assur�ment un cadavre dont il vaut mieux se d�barrasser rapidement par mesure d�hygi�ne. Un loup qui mange un lapin, c�est un cycle naturel. Un blanc de Poularde, rouelle en cuisse, Royale de foie blond, Salpicon de homard, quelques morilles et pointes d�asperges, sauce l�g�re au Savagnin, c�est indubitablement un chef d��uvre, qui modifie pour longtemps votre vision de la cuisine et des volailles.
Bien s�r, ce statut privil�gi� n�est pas conf�r� � cette recette en raison de son nom compliqu�, mais bien parce qu�elle transcende largement la nature commune, qui sans l�intervention d�un excellent cuisinier aurait produit une simple volaille d�c�d�e. Mais, surtout, cette composition est, en termes picturaux et gustatifs, totalement bouleversante. Sa seule existence est le corollaire du travail de plusieurs g�n�rations de chefs et d�ing�nieurs surdou�s (pas de four � induction, pas de recette, en tous cas pas aussi parfaitement ex�cut�e). Quant � lui, le saumon � l�huile d�olive et aromates, ne supporte peut-�tre pas l��pith�te de chef-d��uvre, mais il s�agit n�anmoins assur�ment, pour les m�mes raisons que pr�c�demment, d�une oeuvre d�art.
La gastronomie (pas seulement fran�aise) m�rite donc sans r�serve une place au patrimoine mondial immat�riel de l�humanit�. Il �tait de la responsabilit� du s�nateur Mme Catherine Dumas de convaincre l�Unesco que la gastronomie fran�aise devait recevoir cet honneur plus que les autres. Son rapport �tait convaincant, nous y souscrivions. Malheureusement, la noble d�marche semble d�sormais in�vitablement vou�e � l��chec, l�Unesco ayant d�j� statu� de mani�re presque d�finitive. C�est regrettable.
Pour terminer sur une note plus gaie, et en attendant la suite de ce passionnant d�bat, voici une nouvelle r�jouissante :
Il revient tr�s bient�t�
(et il est encore plus gourmand) |
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